Asset Class Views

Synthèse

  • La croissance américaine ralentit, mais ne s’interrompt pas. Le PIB devrait s’inscrire légèrement en-dessous de la tendance d’ici la fin de l’année. Nous estimons que la Fed dispose d’une marge de manœuvre suffisante pour réduire rapidement ses taux en cas de forte baisse de la croissance.
  • L’incertitude politique demeure élevée. Les droits de douane sont un risque baissier à court terme, qui pourrait néanmoins être contrebalancé plus tard dans l’année par le risque haussier lié aux baisses d’impôts et à la déréglementation.
  • L’économie américaine est en fin de cycle. Si des mesures de relance pourraient atténuer l’impact des droits de douane dans certaines régions, l’environnement économique actuel incite à la diversification régionale et sectorielle.
  • Au niveau régional, nous privilégions les actions japonaises, britanniques et émergentes, en sous-pondérant l’Australie et le Canada. Aux États-Unis, nous privilégions les valeurs technologiques et financières par rapport à la consommation courante et aux matériaux. Par ailleurs, il nous semble intéressant de détenir des obligations d’État australiennes et italiennes tout en sous-pondérant les obligations d’État japonaises.
  • Sur les actions, nous avons un positionnement globalement neutre, voire légèrement surpondéré. Nous maintenons une surpondération du crédit avec une conviction modérée, accompagnée d’une légère surpondération de la duration.

Incertitude politique et ralentissement de la croissance

Lors de sa conférence de presse à l’issue de la réunion de la Fed du mois de mars, le président de la banque centrale Jerome Powell a mentionné dix fois le mot « incertitude ». Pourtant, malgré une baisse de 10 % du S&P 500 au premier trimestre, le principal indice d’incertitude de Wall Street, le VIX, est resté remarquablement stable. Des changements significatifs dans la politique économique pourraient alimenter l’incertitude des banques centrales et des investisseurs, mais l’économie américaine semble ralentir sans s’interrompre.

Dans nos prévisions pour l’année à venir, nous avions noté que si la nouvelle administration Trump mettait d’abord l’accent sur les baisses d’impôts et la déréglementation, elle pourrait stimuler l’économie et les marchés. En revanche, si elle se concentrait sur l’immigration et les droits de douane, les marchés pourraient avoir plus de mal à résister. La priorité donnée aux droits de douane par l’administration a certainement contribué à faire baisser les prévisions de croissance du consensus. L’économie avait néanmoins déjà commencé à ralentir en raison d’une politique monétaire plus restrictive et d’une atténuation de l’offre de main-d’œuvre.

Notre scénario de base pour l’économie américaine en 2025 prévoit une croissance du PIB à 1,7 % (inférieure à la tendance), avec une inflation sous-jacente de 3,1 % d’ici la fin de l’année. Le risque de récession a légèrement augmenté, passant de 15 % à 20 %. Mais nous estimons que la Fed dispose d’une marge de manœuvre importante pour procéder à de nouvelles baisses de taux, en plus des deux qui étaient prévues pour cette année. Même si la confiance des entreprises est en baisse, la solidité des bilans des entreprises et des ménages accroît la résilience de l’économie.

A travers le monde, le ton agressif de l’administration américaine a suscité de fortes réactions politiques. Le plan de relance budgétaire de l’Allemagne pourrait ajouter plus de 70 points de base au PIB et relancer un secteur industriel en plein marasme. Ces perspectives plus favorables pour l’investissement européen, en particulier les dépenses de défense, pourraient simplement compenser l’incidence négative des droits de douane. Cependant, elles signalent un changement significatif (et attendu de longue date) de la politique budgétaire. Il ne semble pas exagéré d’affirmer que le discours controversé du vice-président J.D. Vance devant les dirigeants européens réunis à Munich en a fait davantage pour l’unité européenne que toute autre intervention politique depuis le discours « whatever it takes » de Mario Draghi en 2012.

La Chine répond elle aussi au discours des droits de douane. L’assouplissement de sa politique monétaire est apprécié dans un contexte de faible inflation. Aussi, la rencontre récente du président Xi avec des chefs d’entreprise marque un changement dans l’attitude du gouvernement envers le secteur privé. Si les mesures politiques prises dans le monde entier visent d’abord à atténuer l’impact des droits de douane, elles pourraient également contribuer à réduire l’écart de croissance entre les États-Unis et le reste du monde en 2025.

Adapter les portefeuilles entre droits de douane et baisses d’impôts

L’incertitude politique pèse avec des risques baissiers liés aux droits de douane, tout en tenant compte des risques haussiers suite aux baisses d’impôts et à la déréglementation (probablement plus tard dans l’année). Nous avons réduit le risque global au sein de nos portefeuilles pour faire face à la volatilité récente, mais aussi en prévision d’un risque exceptionnel supplémentaire lié aux droits de douane. Nous avons un positionnement neutre ou très légèrement surpondéré sur les actions, tout en conservant une conviction plus forte à l’égard de notre surpondération du crédit. La possibilité d’un affaiblissement de la croissance motivant une intervention de la Fed justifie une légère surpondération de la duration. Nos modèles quantitatifs indiquent que les meilleures opportunités se trouvent dans les positions de valeur relative qui exploitent les différentiels de valorisation et de politique monétaire.

Les actions américaines ont perdu un peu de leur excédent de valorisation au premier trimestre, tandis que la surperformance des valeurs défensives reflète l’affaiblissement attendu du PIB. Nous estimons qu’une réduction de 5 à 7 % de la croissance du BPA du S&P 500, liée aux droits de douane, limitera le potentiel de hausse des actions américaines. Nos modèles quantitatifs sont négatifs sur le marché américain en raison du niveau élevé des valorisations, mais les grandes capitalisations technologiques ressortent positivement : avec une prime de valorisation désormais au plus bas depuis 2017 par rapport à l’indice. Elles affichent aujourd’hui de bons scores sur les critères de qualité.

Au niveau mondial, nos marchés de prédilection sont le Japon, le Royaume-Uni et les marchés émergents et l’Australie figurant dans le bas de la liste. Après avoir été le marché le plus performant depuis le début de l’année, l’Europe semble avoir dépassé son potentiel de croissance des bénéfices. Tout en étant optimistes quant à l’évolution de la politique monétaire européenne à plus long terme, nous ne courons pas après les valorisations que nous jugeons tendues à l’heure actuelle.

Aux États-Unis, le ralentissement de la croissance accompagné d’un risque limité de récession est favorable au crédit. Les spreads peuvent sembler serrés, mais les rendements totaux restent attractifs dans le haut rendement (HY) tandis que les fondamentaux du crédit (ratio de couverture des intérêts, par exemple) sont solides. Le faible niveau de défaillances et la forte demande sur les marchés primaires renforcent notre conviction que le crédit affichera de bonnes performances cette année. Nous estimons aujourd’hui que la fourchette de fluctuation des taux des bons du Trésor américain à 10 ans devrait se situer entre 4,50 et 3,75 % et voyons de la valeur dans la duration aux niveaux actuels. Sur les marchés internationaux, nous privilégions l’Australie et l’Italie et conservons une sous-pondération des obligations japonaises en raison des hausses salariales et de la perspective de nouvelles hausses de taux.

Le risque global de notre portefeuille est plus bas que fin 2024, en raison du potentiel de volatilité supplémentaire pendant que les marchés évaluent l’impact des droits de douane. Nous estimons malgré tout qu’à mesure que la trajectoire monétaire se précisera et que les priorités du gouvernement se tourneront vers la politique fiscale et la déréglementation, nous trouverons des opportunités d’ajouter du risque. Si les discussions liées aux droits de douane aboutissent sans entraîner une escalade de représailles commerciales, la confiance pourrait se redresser fortement au deuxième trimestre.

En résumé, nous prévoyons un ralentissement, et non un arrêt de la croissance, estimant que la Fed et les autres banques centrales ont des munitions largement suffisantes pour soutenir l’économie mondiale. Les risques proviennent à nos yeux des conflits commerciaux, d’une éventuelle reprise de l’inflation et d’une politique monétaire potentiellement trop restrictive. Nous avons aujourd’hui un positionnement globalement positif par le biais du crédit et sommes prêts à accroître le risque sur les actions en cas de nouvel accès de faiblesse des marchés boursiers.

Solutions multi-actifs : synthèse et idées clés

La synthèse et les principales idées sont examinées en profondeur au cours de notre comité stratégique. Elles reflètent les analyses fondamentales collectives des gérants et des équipes de recherche au sein de notre groupe Multi-Asset Solutions et forment des perspectives communes sur lesquelles nous revenons et que nous testons régulièrement dans toutes nos discussions sur l’allocation d’actifs. Ces idées nous permettent d’orienter nos allocations et de veiller à ce qu’elles soient reflétées dans l’ensemble de nos portefeuilles.

  • Ralentissement sans effondrement de l’économie américaine. Le cycle économique pourrait se prolonger, avec une croissance légèrement inférieure à la tendance en 2025. Amélioration possible de la croissance mondiale en raison de la réponse monétaire aux menaces tarifaires.
  • L’inflation américaine reste supérieure à l’objectif. La Fed surveille de près les chiffres d’emploi et interviendra en cas de faiblesse. Deux baisses de taux prévues en 2025 et une de plus en 2026.
  • Fourchette de 3,75 à 4,50 % pour les taux américains à 10 ans. Position légèrement longue sur la duration mondiale avec une préférence pour les BTP et l’Australie par rapport aux JGB.
  • Marge limitée de compression des spreads de crédit, mais rendements proches de 8 % dans le haut rendement et taux de défaillance favorable au crédit.
  • Le ralentissement de la croissance accompagné d’une faible probabilité de récession incite à surpondérer le crédit, mais positionnement plus neutre sur les actions, car le risque lié aux droits de douane alimente la volatilité pour le moment.
  • Après correction, les Mag-6 représentent un risque positif pour les indices boursiers américains. Au niveau mondial, préférence pour les actions japonaises, britanniques et émergentes (Hong Kong).
  • Sur l’immobilier, reprise des entrées de capitaux et de la demande, le potentiel de rendement et la protection contre l’inflation sont attractifs.
  • Principaux risques : résurgence de l’inflation, politique monétaire trop restrictive, droits de douane, faiblesse du marché de l’emploi et resserrement brutal des conditions de crédit.

Multi-Asset Solutions

L’équipe Multi-Asset Solutions gère plus de 285 milliards de dollars d’actifs en s’appuyant sur l’expertise et les capacités d’investissement inégalées de J.P. Morgan Asset Management. Notre recherche et nos analyses dans le domaine de l’allocation d’actifs constituent le fondement de notre processus de gestion. Ce dernier est soutenu par une équipe de recherche mondiale composée d’une vingtaine de professionnels dédiés qui possèdent ensemble plusieurs décennies d’expérience dans un large éventail de disciplines.

La grille d’allocation de Multi-Asset Solutions est le résultat d’un processus rigoureux et discipliné qui intègre :

  • des éclairages qualitatifs, tenant compte des perspectives macroéconomiques, des opinions sur le cycle économique et des opportunités de marché, tant systématiques que spécifiques ;
  • une analyse quantitative qui considère les inefficiences du marché, des modèles intra et interclasses d’actifs, ainsi que des stratégies directionnelles et de valeur relative ;
  • des réunions consacrées à la stratégie et un dialogue continu entre les équipes de recherche et d’investissement, qui leur permettent de confronter leurs points de vue pour élaborer et valider les opinions d’allocation d’actifs de l’entreprise.

Au 30 septembre 2024