Les gouvernements de l’Union européenne (UE) et les dirigeants d’entreprises sont convaincus que l’un des meilleurs moyens d’atteindre leurs objectifs de durabilité est d’encourager les capitaux à s’orienter vers les initiatives qui favorisent et rendent possible une économie plus durable. De nombreux investisseurs approuvent également cet objectif, mais manquent souvent d’informations pour évaluer et comparer les solutions d’investissement durable en fonction de leur adéquation avec leurs objectifs d’investissement.
Le plan d’action de l’UE sur la finance durable, qui comprend un ensemble de réglementations interdépendantes destinées à encourager l’investissement durable, constitue une avancée majeure pour réorienter les capitaux vers l’économie durable. Un élément clé de ce plan est le règlement de l’UE sur la publication d’informations de durabilité dans le secteur des services financiers (règlement SFDR de l’UE), qui est entré en vigueur le 10 mars 2021. D’autres règlements sont venus s’ajouter, notamment le règlement européen Taxonomie1, entré partiellement en vigueur en janvier 20222 , qui a établi des critères environnementaux spécifiques liés aux activités économiques à des fins d’investissement et qui s’inscrira dans le cadre des obligations d’information renforcées requises par le SFDR de l’UE. Une taxonomie environnementale élargie et une taxonomie sociale devraient suivre.
Dans ce questions/réponses, nous nous penchons plus particulièrement sur le règlement SFDR de l’UE afin d’expliquer l’importance de ce règlement, dont la portée est considérable et pour montrer son impact sur les sociétés de gestion, les conseillers et les investisseurs.
Qu’est-ce que le règlement SFDR de l’UE ?
Le règlement SFDR de l’UE est conçu pour permettre aux investisseurs de distinguer et de comparer plus facilement les nombreuses stratégies d’investissement durable actuellement disponibles au sein de l’Union européenne. Le SFDR de l’UE vise à aider les investisseurs en leur offrant une information plus transparente quant au degré avec lequel les produits financiers prennent en compte les caractéristiques environnementales ou sociales, investissent dans des investissements durables ou ont des objectifs durables. Ces informations sont désormais présentées de façon plus homogène.
Le règlement SFDR de l’UE oblige les gestionnaires d’actifs et les conseillers en investissement à publier des informations spécifiques quant à la manière dont ils prennent en compte deux considérations essentielles : les Risques en matière de durabilité et les Principales incidences négatives. Pour ce qui est des sociétés de gestion, le règlement SFDR impose également de rendre transparentes les politiques de rémunération tenant compte de l’intégration des risques liés au développement durable. En outre, il vise à aider les investisseurs à faire leur choix entre les différents produits en imposant des niveaux croissants d’information, en fonction du degré de prise en compte du développement durable.
Le règlement SFDR de l’UE prévoit trois catégories de produits différentes :
Les produits relevant de « l’article 6 » intègrent les considérations relatives au risque environnemental, social et de gouvernance (ESG) dans le processus de décision d’investissement, ou expliquent pourquoi le Risque de durabilité n’est pas pertinent, mais ne satisfont pas aux critères supplémentaires applicables aux stratégies relevant de l’article 8 ou de l’article 9.
les produits relevant de « l’article 8 » promeuvent des caractéristiques sociales ou environnementales et peuvent investir dans des investissements durables, mais ne s’articulent pas autour d’un objectif d’investissement durable.
les produits relevant de « l’article 9 » ont un objectif d’investissement durable.
Les informations qui doivent être publiées depuis le 10 mars 2021 concernent plusieurs types de produits financiers, dont notamment les OPCVM, les FIA et les mandats dédiés.
Les niveaux 1 et 2 désignent les niveaux réglementaires correspondants
Pourquoi le règlement SFDR de l’UE est-il important ?
Le règlement SFDR de l’UE est conçu pour réorienter les capitaux vers une croissance durable et aider les clients à mieux faire leurs choix en matière d’investissement durable.
Ses principaux objectifs sont d’assurer une plus grande transparence quant aux caractéristiques environnementales, sociales et de durabilité des marchés financiers et de créer des normes pour la communication et la publication d’informations relatives à ces considérations.
Le renforcement de la transparence et la mise en place de normes facilitent deux autres considérations importantes. En premier lieu, il devient plus difficile pour les sociétés de gestion d’actifs de « verdir » leurs produits — en d’autres termes, ils ne peuvent pas simplement se contenter d’apposer un label ESG ou « développement durable » sur un produit, sans faire preuve de transparence quant à ce qui justifie l’apposition ces labels.
Deuxièmement, grâce à cela, les investisseurs sont beaucoup mieux à même de comparer les options d’investissement en fonction du degré de prise en compte des facteurs ESG dans le processus de décision d’investissement, ce qui les aide à prendre des décisions éclairées en accord avec leurs objectifs d’investissement.
À qui s’applique le règlement SFDR de l’UE et quels sont les types de produits et de services concernés ?
Le champ d’application du règlement SFDR est relativement large, puisqu’il s’applique à tous les acteurs des marchés financiers et aux conseillers financiers établis dans l’UE, ainsi qu’aux gestionnaires ou conseillers en investissement établis en dehors de l’UE, qui commercialisent (ou ont l’intention de commercialiser) leurs produits à des clients de l’UE en vertu de l’article 42 de la directive sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs (directive AIFM de l’UE).
Pour ce qui est des produits, les obligations d’information s’appliquent aux OPCVM, aux fonds alternatifs, aux portefeuilles dédiés et aux mandats de gestion déléguée, ainsi qu’aux conseils financiers (proposés au sein de l’UE ou par une entreprise d’investissement de l’UE).
Bien que le Royaume-Uni soit hors du champ d’application du SFDR de l’UE, la Financial Conduct Authority (FCA) du Royaume-Uni a publié en novembre 2021 un document de réflexion sur les exigences de publication d’informations sur la durabilité et les labels d’investissement (règlement SDR du Royaume-Uni)3 , qui rejoint en partie le SFDR de l’UE. En décembre 2021, la FCA a publié une déclaration de principe intitulée « Renforcement des obligations d’information sur le climat par les sociétés de gestion d’actifs, les assureurs-vie et les prestataires de retraite réglementés par la FCA » (Enhancing climate-related disclosures by asset managers, life insurers and FCA-regulated pension providers)4 . Cette dernière publication est alignée sur la Task Force on Climate-Related Financial Disclosures (TCFD) du Conseil de stabilité financière (FSB).
En quoi consistent les Risques en matière de durabilité et les Principales incidences négatives ? Quelle est leur incidence sur les sociétés de gestion d’actifs et les conseillers ?
Pour atteindre l’objectif du règlement SFDR de l’UE, à savoir développer la finance durable en renforçant la transparence et en établissant des normes, les sociétés de gestion d’actifs et les conseillers doivent indiquer comment ils prennent en compte deux facteurs clés : les Risques en matière de durabilité et les Principales incidences négatives. Sous réserve de seuils spécifiques, les sociétés de gestion d’actifs sont tenues de publier leurs politiques tant au niveau de l’entreprise que des produits, tandis que les conseillers sont tenus d’expliquer comment ces facteurs sont pris en compte dans les conseils qu’ils prodiguent.
Le règlement SFDR de l’UE définit de manière spécifique les Risques en matière de durabilité et les Principales incidences négatives :
Les Risques en matière de durabilité font référence aux événements ou aux situations de nature environnementale, sociale ou de gouvernance, comme le changement climatique, qui ont effectivement ou sont susceptibles d’avoir un impact négatif important sur la valeur d’un investissement.
Les Principales incidences négatives désignent les effets négatifs que les décisions d’investissement ou les conseils en investissement pourraient avoir sur les facteurs de durabilité. Il peut s’agir, par exemple, d’un investissement dans une entreprise dont les activités contribuent de manière significative aux émissions de dioxyde de carbone ou dont les pratiques en matière de gestion de l’eau, des déchets ou des terres sont déficientes.
Les sociétés de gestion d’actifs et les conseillers doivent fournir des informations spécifiques concernant la prise en compte des Risques en matière de durabilité et des Principales incidences négatives
Les grandes entreprises (de plus de 500 employés) sont tenues de divulguer la manière dont elles prennent en compte les Principales incidences négatives depuis le 30 juin 2021, avec un rapport sur les Principales incidences négatives qui devrait entrer en vigueur à la mi-2023 (représentant les données de l’année 2022).
Sous réserve de son adoption dans la législation européenne, à partir du 1er janvier 2023, les sociétés de gestion d’actifs seront tenues de détailler la manière dont elles tiennent compte des Principales incidences négatives de manière plus spécifique et plus quantifiable, en se référant notamment à un certain nombre d’indicateurs liés au climat et à l’environnement, ainsi qu’à des indicateurs liés aux questions sociales et aux salariés, au respect des droits de l’homme et à la lutte contre la corruption et les pots-de-vin. Sur les 64 indicateurs environnementaux et sociaux actuels, qui peuvent être regroupés en catégories plus larges, telles que les émissions de gaz à effet de serre, la biodiversité ou l’eau, 18 constituent des indicateurs de base, tandis que pour les 46 autres, les sociétés de gestion disposent d’une certaine flexibilité quant au niveau de détail à fournir à propos desdites incidences.
L’intérêt suscité par les Principales incidences négatives a augmenté à la veille de l’inclusion des préférences des clients en matière de développement durable dans la mise à jour de MiFID II, qui entrera en vigueur le 2 août 2022. L’une des façons dont les clients peuvent choisir d’exprimer leurs préférences en matière de durabilité consiste à prendre en compte les Principales incidences négatives sur les facteurs de développement durable dans leurs investissements. En conséquence, les gestionnaires et conseillers en investissement devront démontrer comment les Principales incidences négatives sont prises en compte dans un investissement.
Exemple de prise en compte des Principales incidences négatives dans un investissement
Pour les sociétés de gestion d’actifs, l’intégration des Risques liés en matière de durabilité et des Principales incidences négatives se fait à différents stades du processus d’investissement.
Liste de contrôle pour les gérants d’actifs intégrant les Risques en matière de durabilité et les Principales incidences négatives dans le processus d’investissement
Il est important de noter que les régulateurs continuent d’examiner les Principales incidences négatives et les exigences en matière de publication d’informations sur les produits financiers dans le cadre du règlement délégué SFDR de l’UE. La Commission européenne a invité les autorités européennes de surveillance à : (1) rationaliser et développer davantage le cadre réglementaire ; (2) envisager d’étendre les listes d’indicateurs universels pour les Principales incidences négatives, ainsi que d’autres indicateurs ; et à (3) affiner le contenu de tous les indicateurs concernant les incidences négatives ainsi que leurs définitions, méthodologies applicables, paramètres et présentation. 5
Quels sont les différents niveaux d’information introduits par le règlement SFDR de l’UE ?
Comme expliqué à la question 1, le règlement SFDR de l’UE prévoit actuellement trois niveaux distincts d’information concernant l’investissement durable et les considérations ESG applicables aux produits d’investissement.
Les produits financiers visés à l’article 6 doivent publier des informations indiquant la manière dont les risques en matière de durabilité sont intégrés dans leurs décisions d’investissement ainsi qu’une évaluation des incidences probables des risques en matière de durabilité sur le rendement des produits financiers.
Les produits financiers relevant de l’article 8 et de l’article 9 comportent des détails sur divers sujets liés à la durabilité et à l’ESG. Le tableau ci-dessous présente un aperçu des thèmes abordés, sans toutefois constituer une liste exhaustive.
Aperçu des thèmes abordés dans les informations à fournir pour les produits relevant de l’article 8 et de l’article 9
Qu’est-ce que le règlement européen « Taxonomie » et comment affecte-t-il le règlement SFDR de l’UE ?
Obligations de publication supplémentaires à venir au titre du règlement européen « Taxonomie »
Le règlement européen Taxonomie, qui introduit des critères environnementaux normalisés au sein de l’UE, est entré en vigueur le 1er janvier 2022. Sous réserve que les normes techniques réglementaires correspondantes du règlement SFDR de l’UE soient transposées dans le droit communautaire, à partir du 1er janvier 2023, des éléments du règlement européen Taxonomie seront intégrés dans les obligations d’information définies par le règlement SFDR de l’UE. Ceci aura un impact sur les produits financiers relevant de l’article 8 ou de l’article 9. Les éléments spécifiques de la Taxonomie de l’UE à publier dans le cadre du règlement SFDR de l’UE sont décrits ci-dessous.
Les produits relevant de l’article 8 devront préciser s’ils investissent dans des investissements durables et, si tel est le cas, ils devront indiquer si ces investissements sont réalisés dans des activités alignées sur la Taxonomie de l’UE.
Les produits relevant de l’article 9, dont l’objectif par définition est l’investissement durable, devront indiquer si leurs investissements durables sont réalisés dans des activités alignées sur la Taxonomie de l’UE.
Quelles sont les autres évolutions à venir dont les investisseurs devraient tenir compte ?
Les investisseurs doivent encore être attentifs à quelques éléments supplémentaires :
Les normes techniques réglementaires (RTS) de niveau 2, qui intégreront la Taxonomie européenne avec les informations à fournir pour les produits relevant des articles 8 et 9, restent en suspens, mais leur approbation est attendue à moyen terme et leur mise en œuvre est prévue pour le 1er janvier 2023 6.
Comme indiqué précédemment, en novembre 2021, la FCA britannique a publié un document de réflexion sur les exigences de publication d’informations sur la durabilité et les labels d’investissement (règlement SDR du Royaume-Uni), créant ainsi un cadre de divulgation parallèle qui va au-delà du règlement SFDR de l’UE.
Il conviendra d’examiner les nouvelles initiatives de la Plateforme européenne sur la finance durable et de la Commission européenne, en particulier celles visant à mettre en place une éventuelle taxonomie sociale7 et une taxonomie environnementale élargie8 .
Il faudra également se pencher sur les normes ESG sectorielles portées par des tiers à mesure qu’elles seront mises à jour pour s’aligner sur le règlement SFDR de l’UE et le règlement Taxonomie de l’UE.
L’intégration de considérations ESG peut avoir une incidence sur les actes délégués dans le cadre des directives OPCVM, AIFM, MIF 2, DDA et Solvabilité II de l’Union européenne.
L’obligation d’évaluer les préférences des clients en matière de durabilité prévue par la directive européenne MiFID II entrera en vigueur le 2 août 2022.
Les exigences réglementaires parallèles d’étiquetage, telles que les écolabels, ou les exigences réglementaires connexes de publication d’information des régulateurs d’autres régions, comme la Hong Kong Securities and Futures Commission, peuvent interagir avec règlement SFDR de l’UE et avoir un impact cumulatif sur les produits et les publications d’information.
Perspectives
Le règlement SFDR de l’UE constitue une évolution positive pour la croissance et le développement de l’investissement durable ESG dans l’UE. À mesure que les investisseurs manifestent un intérêt de plus en plus grand pour l’investissement durable et ESG, le règlement permet aux investisseurs de s’appuyer sur des comparaisons et des conseils clairs en matière d’investissements durables et ESG, encourageant les sociétés de gestion d’actifs et les conseillers à orienter les flux de capitaux vers les produits d’investissement contribuant à une économie plus durable.
J.P. Morgan Asset Management est fier d’aider ses clients à atteindre leurs objectifs d’investissement durable et ESG. Pour toute question concernant le règlement SFDR ou l’investissement durable, nous vous invitons à contacter votre interlocuteur J.P. Morgan Asset Management.
1 Le règlement européen Taxonomie a été publié au Journal officiel de l’Union européenne le 22 juin 2020 et est entré en vigueur le 12 juillet 2020. Ce règlement définit quatre conditions générales qu’une activité économique doit remplir pour être considérée comme écologiquement durable.
2 Le 25 novembre 2021, la Commission européenne a envoyé une lettre au Parlement européen et au Conseil de l’Union européenne annonçant un report de la date d’application des normes techniques réglementaires (RTS) dans le cadre du règlement SFDR de l’UE. La Commission a reporté la mise en œuvre des RTS du SFDR au 1er janvier 2023. https://www.esma.europa.eu/sites/default/files/library/com_letter_to_ep_and_council_sfdr_rts-j.berrigan.pdf
3 https://www.fca.org.uk/publication/discussion/dp21-4.pdf
4 https://www.fca.org.uk/publication/policy/ps21-24.pdf
5 https://www.esma.europa.eu/document/mandate-esas-pai-product
6 Le 6 avril 2022, la Commission européenne a adopté les normes techniques réglementaires (RTS) dans le cadre du règlement sur publication d’informations de durabilité dans le secteur des services financiers (règlement SFDR de l’UE). En plus des RTS elles-mêmes, la Commission a publié les annexes qui les accompagnent :
6a Annexe 1 – avec le modèle de déclaration des principales incidences négatives sur le développement durable
6b Annexe 2 – avec le modèle de déclaration précontractuelle pour les produits relevant de l’article 8
6c Annexe 3 – avec le modèle de déclaration précontractuelle pour les produits relevant de l’article 9
6d Annexe 4 – avec les exigences relatives à la présentation et au contenu des rapports périodiques des produits relevant de l’article 8
6e Annexe 5 – avec les exigences relatives à la présentation et au contenu des rapports périodiques des produits relevant de l’article 9
7 https://ec.europa.eu/info/sites/default/files/business_economy_euro/banking_and_finance/documents/280222-sustainable-finance-platform-finance-report-social-taxonomy.pdf
8 https://ec.europa.eu/info/sites/default/files/business_economy_euro/banking_and_finance/documents/220329-sustainable-finance-platform-finance-report-environmental-transition-taxonomy_en.pdf
09ui211308120035